Texte de Lorie Caouette
« Est-ce un garçon ou une fille ?» « C’est pour quand ?» « Veux-tu allaiter ?»
Quand on est enceinte, avoue qu’on se fait soudainement bombarder de questions par notre entourage, proche ou éloigné… et même par de parfaits inconnus ! Comme si notre intimité devenait soudainement publique parce que notre belle bedaine, et bien on ne peut pas la cacher.
Est-ce que je veux allaiter ? Oui ou non ? La réponse est rarement si claire lors d’une première grossesse ! Tant d’inconnu devant soi !
Et peu importe la réponse que l’on donne, on reçoit sans l’avoir demandé l’opinion ou le jugement de notre interlocuteur, même si bien souvent il ne veut pas mal faire.
Ou, on se retrouve à écouter toutes sortes d’histoires de « moi, ma belle-sœur… ça été l’enfer… gerçures… blabla ». Malheureusement, le sensationnalisme des histoires difficiles voyage beaucoup plus facilement que les belles histoires d’allaitement faciles et simples. Et des belles histoires, il y en a beaucoup !

LE PROJET
Après avoir porté, accouché et allaité mes 3 enfants, j’ai décidé de tourner la page sur ma maternité. Mais ce sujet restait une véritable passion pour moi et j’ai décidé de me former pour devenir marraine d’allaitement. J’ai eu le bonheur pendant plusieurs années d’accompagner d’autres mamans dans leur projet d’allaitement.
Car oui, choisir d’allaiter est un projet ! Il se réfléchit, il se prépare.
Lors des premières rencontres avec ces futures mamans qui avaient choisi d’allaiter, je les invitais toujours à se questionner sur l’importance de l’allaitement à leurs yeux. Et je vous dirais que plus d’une fois sur 2, elles me répondaient « C’est sûr que je veux essayer, mais je ne veux pas m’acharner si ça ne fonctionne pas. »
Mes questions suivantes étaient alors, « Mais que considères-tu comme de l’acharnement ? As-tu une durée de temps en tête ? Quels sont tes critères d’une réussite, ou d’un échec ? »
Et bien souvent, elles n’en avaient aucune idée. Et c’est normal ! La maternité comporte son lot de défis, de peurs et d’inconnus. C’est un grand saut dans le vide. Peut-être que cette réponse était pour elles une façon de se protéger de la peur de l’échec ? Il n’y a pourtant pas de barèmes de réussite ou d’échec, chaque expérience est unique.

MON CONSEIL LE PLUS PRÉCIEUX
S’il y a un conseil précieux que je peux te donner, au-delà d’être bien informée du côté théorique sur le sujet, c’est d’être bien entourée.
Oui d’être en contact avec ton infirmière, ta sage-femme, ou d’avoir une marraine d’allaitement au bout du fil pour répondre à tes questions techniques.
Mais surtout, je te conseille de briefer ton entourage sur ton projet d’allaitement, tes motivations et tes attentes. Prépare ceux qui seront en première ligne avec toi. Ton/ta partenaire, ta mère, ta meilleure amie.
Il y a souvent des hauts et des bas dans cette belle aventure. Et avec la fatigue et les hormones, on n’est pas à l’abri des moments de découragement. Il y aura peut-être une journée difficile où tout te semblera être une montagne. Et le lendemain, tout se tassera et tu seras heureuse d’avoir persévéré. Et moi j’aime dire que persévérer, ce n’est pas s’acharner !
Ton entourage voudra ton bien, et ne voudra pas te voir « souffrir ». Mais se faire dire
« tu devrais lui donner la bouteille » au premier pépin, ça peut être douloureux sur l’estime de soi, et sur ta motivation.
Si tu leur as partagé tes attentes, ils seront mieux outillés pour te ramener dans le positif, de te rappeler pourquoi tu le fais. Avoir à ses côtés un complice présent, qui t’encourage à ne pas lâcher, qui te dit que tu fais bien ça, et qui cherche des solutions avec toi, ça peut sembler anodin, mais ça fait toute la différence.
S’OFFRIR CE CADEAU
Après ce temps d’apprentissage, quelle joie on éprouve de finalement pouvoir profiter de tous les bonheurs et bienfaits qu’offrent l’allaitement. Il faut garder le cap vers ce cadeau que l’on s’offre à soi et à bébé. La « paye de lait » comme on dit !
Ce contact privilégié avec bébé, la liberté de pouvoir le nourrir partout, tout le temps, pendant de nombreux mois, voire années si tu le veux. Voyager avec un bagage plus léger. D’avoir le sentiment d’offrir le meilleur de soi-même à son enfant. Ça en vaut l’effort, je te le dis !
SAVOIR S’ÉCOUTER
Bien sûr il y a des situations où ça devient trop ou bien qu’on ressente le besoin de passer à autre chose. Dans l’indécision, on a souvent le réflexe de demander l’avis de tous et chacun. Mais je crois que la décision d’arrêter l’allaitement doit venir de soi.
Il faut s’écouter, respecter ses limites. Même si tu es une nouvelle maman, il faut faire confiance à ton instinct. Tu seras capable de savoir ce qui est le mieux pour toi et ton enfant, quand le moment le nécessitera. Écoute ta petite voix et n’en doute pas. Et le soutien de ton entourage sera primordial encore tout autant, pour t’accompagner dans le respect de cette décision, sans jugement.
Et ce n’est jamais un échec de décider d’arrêter. 3 jours, 3 mois, 3 ans… L’allaitement, c’est une grande aventure qui nous fait découvrir une force méconnue en nous-mêmes. Et chaque tétée est un cadeau offert à bébé qui ne peut lui être enlevé. Sois-en en fière !

À CHAQUE HISTOIRE SA BEAUTÉ
Il y a des allaitements qui filent tout doux, où tout vient naturellement. Et il y a ces mamans battantes qui ont traversé les épreuves, petites et grandes, pour réaliser leur rêve d’allaitement.
Tellement d’histoires différentes… J’ai connu des femmes qui ont allaité des jumeaux, d’autres qui ont tiré leur lait goutte à goutte pour nourrir leur bébé prématuré. Une maman qui a décidé de tirer son lait pour seulement le donner à la bouteille. D’autres qui sont retournées au travail en tirant leur lait à la pause, ou qui pratiquent l’allaitement mixte (en alternance avec de la préparation). Et j’ai même des amies proches qui ont décidé de ne pas allaiter du tout, parce qu’elles n’avaient pas cet appel.
Toutes, sont des mamans merveilleuses et inspirantes.
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Je te laisse sur une photo mon premier moment d’allaitement, il y a de cela 13 ans maintenant. Un instant figé dans le temps qui restera toujours doux à mon coeur.